Dernièrement, j’ai encore entendu un jeune homme se prétendre et se proclamer citoyen du monde. C’est de la fausse représentation. Ce citoyen n’existe pas ! Je peux être un citoyen ou une citoyenne ouverte sur le monde, informée, préoccupée du sort de l’humanité ou de telle ou telle partie de celle-ci mais cela ne fait pas de moi, une citoyenne ou un citoyen du monde. Ceux qui revendiquent un tel titre oublient une réalité immuable, qu’ils le veuillent ou non : ils sont, comme chacun de nous, de quelque part. On peut ne pas aimer ce lieu d’où nous sommes mais on ne peut le nier. C’est la part incontournable de notre propre réalité. Au fil des ans, je peux renier mon lieu d’appartenance mais ce n’est jamais complètement possible. Ce lieu fait partie de mon ADN. J’ai connu plusieurs Québécois qui se sont consacrés à une action humanitaire à l’étranger. Ils ont appris la langue du pays, compris les us et coutumes pour ensuite les adopter. Mais, en s’entretenant avec eux, on pouvait très rapidement, voir leur origine refaire surface : un mot, une référence culturelle, tel type d’humour, telle expression, telle manière de réagir trahissaient la couleur de leur origine. Doivent-ils s’en désoler ? Pas le moins du monde ! Un Québécois est très différent d’un Américain, d’un Canadien du ROC ou d’un Mexicain. Même si nous partageons avec les autres, le même désir de paix, les mêmes préoccupations de vivre heureux en famille ou avec les amis, notre manière d’y arriver, notre façon de l’exprimer est profondément différente. Et c’est tant mieux ! Je peux découvrir une grande affinité avec tel autre pays mais je suis différent de ses habitants. Dans le livre (1) où il nous livre ses pensées, le grand acteur Gérard Depardieu fait l’éloge des différences et vilipende le monde des communications qui voudrait faire de nous « un troupeau sans âme » : « La différence, écrit-il, n’est pas un droit, c’est un devoir ! » Et ce qu’il ajoute peut très bien s’adresser à ces soi-disant citoyens du monde : « Tu veux aller à la rencontre de qui, si on est tous les mêmes ? » «La Manic», de Georges Dor , «Les gens de mon pays», de Vigneault, ou «Montréal», d’Arianne Moffatt, n’auraient jamais pu être composés ailleurs qu’ici. Ce sont ces couleurs uniques que je peux offrir à l’autre, car je viens de quelque part… d’autre. (1) Gérard Depardieu, Monstre, Cherche midi, Paris, 2017