La beauté ne vieillit pas

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Par Robert Jasmin
La beauté ne vieillit pas

Depuis la veille, août n’était plus. Pour souligner la fin de l’été des vacances, la ville de Neuville avait organisé certaines activités qui marquaient l’événement. Dans un ciel sans nuages, un soleil insolent avait littéralement immobilisé dans la chaleur, les gens réunis en cette matinée de samedi pour entendre un chanteur et son piano. Tous avaient pris place sur le parterre entre le fleuve et la Salle des fêtes. Rien de spectaculaire ne les attendait, je veux dire rien de ce qui réunit des foules bruyantes pour entendre de la musique bruyante. Les gens étaient là pour écouter. La musique et les mots des chansons.

C’était des airs et des mots connus de tous, mais peu entendus par les temps qui courent. Des mots qui dormaient dans les mémoires et qu’un musicien faisait revenir en beauté. Des mots qui ont grandi chez nous au Québec ou en France. Parce que la France c’est aussi chez nous. Notre langue ne reconnaît pas les frontières ni les océans. Chaque chanson ramenait une époque. Pour certains c’était des souvenirs et pour d’autres, la découverte de mots déjà entendus, mais jamais vraiment écoutés.

À les entendre, je prenais conscience de l’ampleur et de la richesse de ce patrimoine trop peu visité par les enseignants et les enseignantes. L’histoire et la géographie, par exemple, peuvent très bien être servies par La Manic. Des chansons que certains parents connaissent par cœur, mais qu’ils gardent bien cachées au fond d’eux. Est-ce la peur de paraître ringards dans un monde où tout ce qui n’est pas d’aujourd’hui est vieux et dépassé ? Il faut oser dire que la beauté ne vieillit pas. La mer de Trenet comme la mer dans un tableau de Monet ne prennent que les rides des vagues et jamais celles du temps.

Dans l’art, la beauté vient des choses inutiles, si chères à Sylvain Lelièvre. C’est ce que le chanteur nous a offert avec son piano : des mots et une musique volés au temps. Certains trouveront incongru de livrer de tels propos alors qu’il y aurait tellement à dire sur la lutte électorale. À ceux-là je réponds que mon texte est tout à fait pertinent en cette période d’élections : il parle de culture, du pays et de la langue. Des thèmes tout aussi pertinents que l’économie ou la santé. L’âme d’un peuple est une constituante de sa vie. De la vie, et tout ce qu’on fait avec, comme le chante Georges Dor.

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