La rentrée avec le temps

par Robert Jasmin
La rentrée avec le temps

Le temps se rit des années, des saisons et des fêtes qui sont toutes des inventions humaines. Le temps passe sans se soucier de tous ces artifices. Mais les êtres humains ne se laissent pas dominer par le temps, ils veulent le domestiquer, le compter et le raconter. C’est ainsi que par le langage nous avons dénommé les parcelles de temps pour le rendre moins banal et lui donner un sens. Car sans le langage humain, le temps ne fait que la seule chose qu’il sait faire : passer. La fin de l’été, par exemple, fait partie de ce temps domestiqué.

Dans les derniers jours du mois d’août (mois nommé par les Romains d’après le règne de l’empereur Auguste), les êtres humains ont déclaré qu’un nouveau cycle commençait, celui qui les rappelle au boulot. Ils l’ont nommé «la rentrée». Mais avec la flexibilité du temps de travail et les choix de plusieurs, les vacances se prennent à d’autres moments de l’année alors, pour eux, la rentrée n’existe pas vraiment.

S’il y a une rentrée à la fin de l’été c’est surtout celle des enfants et des jeunes ainsi que celle de leurs parents qui s’y conforment dans leur propre vie. La rentrée scolaire domine toutes les autres. Mais dans cette catégorie, une rentrée détonne parmi les autres. Je dirais même qu’elle est plus une entrée qu’une rentrée. Car, certains enfants ne retournent pas à l’école mais y entrent. Et on ne peut qu’avoir une pensée attendrissante pour ces petits qui vivent leur première rupture et le commencement d’une autre vie.

Ils seront en contact avec d’autres influences que celle, familière, de leurs parents. Ils apprendront que les mots ont des lettres et que par elles, ils peuvent survivre aux mortels que nous sommes et déjouer le temps. Par les mots écrits, ils apprendront que c’est grâce à eux que les hommes ont inventé les mots «rentrée scolaire», une rentrée qu’ils connaîtront l’année qui suit leur entrée.

Et il y a les autres, les plus vieux parmi les jeunes. Surtout ceux dont la rentrée implique des choix de vie et des interrogations sur l’avenir. Il est fort à parier qu’ils regretteront quelque peu ces rentrées du temps de l’insouciance, de l’innocence et de la légèreté, ce temps hors du temps réel. Mais un temps  qu’ils peuvent retrouver dans le monde de la fiction et de la poésie, celui qu’ils ont pu connaître au fil du temps de toutes les rentrées passées.

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