Deux millions de Français ont vu le film en deux mois et il semble que le phénomène soit en train de se reproduire au Québec. J’ai compris, après avoir vu Simone, pourquoi il en était ainsi : on ne peut garder cette découverte pour soi et le bouche à oreille fait son œuvre. De quoi s’agit-il ? De la vie d’une femme, Simone Veil, qui a été profondément marquée par son siècle et qu’elle a tout aussi profondément marqué. Née en 1927 et décédée en 2017, elle a été témoin et protagoniste des grands événements qui ont façonné ce siècle.
Simone Veil est née de parents juifs non pratiquants et, dira-t-elle dans sa biographie, très laïques. En 1944, sa famille n’en échappera pas moins aux rafles des nazis et des collaborateurs français, pour qui le simple fait d’appartenir à cette communauté méritait la mort. Son père et son frère furent envoyés en Lituanie où ils disparurent sans laisser de traces. Sa mère et sa sœur furent envoyées à Auschwitz, où le travail obligatoire dans ce camp infâme les sauva des chambres à gaz et des fours crématoires. La mère de Simone y mourra du typhus et ses deux filles purent survivre. L’autre sœur de Simone, résistante, fut capturée et déportée au camp de Ravensbruck.
De retour en France, résiliante et déterminée, Simone poursuivra des études supérieures et devint magistrate. Elle ne cessa d’affronter les préjugés dans un monde d’hommes et de défendre les droits et les places des femmes. Le film rend bien le climat social de cette époque de l’après-guerre à travers les commentaires et surtout le visage hargneux des hommes devant cette femme qui fait fi des injures et des menaces en s’imposant courageusement. Après sa carrière judiciaire, elle deviendra ministre de la Santé sous deux gouvernements successifs. Elle présente et fait voter une loi qui dépénalise l’avortement puis entreprend une réforme du système pénitentiaire après avoir pris connaissance des conditions de détention. Enfin, sa réputation la devançant, elle sera élue la première présidente du Parlement européen.
À l’heure où les médias annoncent, avec tambours et trompettes publicitaires, une Barbie et autres Marvels comme nourriture culturelle pour les ados, on ne peut que souhaiter que parents et enseignants proposent fortement le film Simone aux jeunes. Ne serait-ce que pour accomplir un devoir de mémoire, car le cinéma peut être plus que du divertissement. C’est aussi, à l’occasion, un moment d’édification personnelle.
Note : la lecture préalable de la biographie Wikipédia de Simone Veil est conseillée.
Simone, un film imposant et inspirant
par Robert Jasmin