Les camionnettes sont moins nombreuses chez nous que les fusils d’assaut chez nos voisins du sud, mais elles peuvent tout aussi bien servir pour une tuerie de masse. On l’a vu à Amqui la semaine dernière. Le scénario qui fait suite à ces drames est partout le même : des messages de sympathie, justifiés, qui affluent de partout, des témoignages d’incrédulité, des mouvements de colère et surtout, des mots d’impuissance devant une geste aussi absurde qui assombrit la vie de tellement de gens. Et, à chaque fois, des récriminations à propos de l’insuffisance de services et de soins pour affronter la maladie mentale.
Un accroissement des ressources en cette matière serait souhaitable, mais ne devons-nous pas nous pencher sur les causes profondes qui favorisent les maladies mentales ? Se peut-il que le mal provienne en grande partie du type de société qui a pris naissance ces dernières décennies ? Les psychoses causées par un dysfonctionnement du cerveau proviendraient-elles, entre autres, des renversements majeurs et très rapides des valeurs internes des personnes ? À quoi servirait d’accroître les services si le nombre de cas pathologiques continue d’augmenter encore plus rapidement ?
Certains experts commencent à tourner leur regard vers les transformations radicales qui ont modifié l’âme de nos sociétés. Sans oublier la souffrance individuelle, ils nous recommandent de regarder un peu plus la souffrance sociale qui, elle, peut conduire à des cas de détresse individuelle. On parle souvent de l’isolement dans lequel les responsables d’attentats meurtriers s’étaient enfoncés, mais n’est-ce pas là la marque de commerce de notre société ?
Le psychiatre et psychanalyste italien Gaetano Benedetti disait ceci : » les névroses diminuent là où le sentiment communautaire prend le pas sur la compétition individuelle ». Selon lui, le bien-être de la communauté doit primer sur l’égocentrisme.
J’ai constaté que l’engagement dans une cause collective réduit le sentiment de détresse qui peut se manifester dans les périodes de changement. Les relations sociales véritables n’ont rien à voir avec les soi-disant amis Facebook et aucune photo ne rendra la vérité du visage qu’on retrouve sur la personne lorsqu’elle est devant nous. Les gens d’Amqui vous le diront.