L’agriculture est en crise. Depuis son engagement dans le domaine agricole, le président de l’UPA de Portneuf, Christian Hébert, l’affirme. « Je ne suis pas le genre à être alarmiste, dit-il, mais ce n’est pas pour rien qu’il y a une sortie tant locale que nationale. »
Jamais, dans l’histoire, une telle succession de facteurs ne s’est produite : une pandémie, suivie de l’un des plus gros conflits mondiaux et d’une guerre commerciale qui n’en finit plus avec la Chine.
« Ce sont autant de circonstances qu’on n’avait jamais connues de notre vivant, annonce M. Hébert. Tu rajoutes ça aux difficultés inhérentes au métier de producteur agricole et tu combines ça avec les changements climatiques. Quand il arrive un problème, ce n’est jamais une chose, c’est la combinaison de plusieurs facteurs qui fait que c’est sans précédent. »
Or, ces problèmes internationaux ont une incidence sur l’agriculture. « On ne vit pas dans un vase clos, s’exclame M. Hébert. L’inflation, l’augmentation des prix des intrants, les taux d’intérêt, la montée fulgurante du prix des carburants, ce n’est pas juste pour nous autres dans Portneuf, ce sont des facteurs internationaux. »
Combinaison de facteurs
Plusieurs facteurs contribuent au prix si élevé des terres agricoles. Selon le président local de l’UPA, les secteurs de Portneuf et de la Mauricie sont ceux qui ont été les plus affectés au Québec, avec des augmentations de plus de 19 % des fonds de terre, et ce, seulement au courant de la dernière année. C’est également du jamais vu. Dans le passé, on trouvait que des augmentations de 8, 9 ou 10 % par an étaient catastrophiques. « Cette année, ça a été le record à travers le Québec. » Actuellement, une entreprise agricole sur cinq serait en difficulté.
Le phénomène d’accaparement des terres par ceux qui voient le sol non pas pour sa valeur agronomique, mais plutôt spéculative, aggrave la situation actuelle.
« Les grands fonds monétaires, les entreprises en construction, les cimenteries, ils n’ont pas de considération sur le fait que ce fond de terre là est notre garde-manger, déplore le président. Les mécanismes qu’on s’est donnés au fil des années ont des défaillances, ils ne nous ont pas protégés. »
Le monde agricole portneuvois présentait des signes positifs ces dernières années. Contrairement aux autres régions, on y constatait une augmentation du nombre d’exploitations, et ce, pour une troisième année consécutive. « Avec la situation économique qu’on vit, révèle Christian Hébert, cette belle croissance, cette belle reprise du monde agricole, on ne veut tellement pas la perdre. »
Sondage de l’UPA
L’Union des producteurs agricoles a récemment dévoilé les résultats d’un sondage sur les conséquences de l’inflation, de l’augmentation des coûts de production et de la flambée des taux d’intérêt sur la situation financière des fermes québécoises.
« La situation est insoutenable pour certaines productions agricoles ainsi que pour les producteurs situés dans des régions périphériques comme la nôtre. La rentabilité n’est tout simplement plus au rendez-vous. Nous traversons une crise importante actuellement avec la hausse des taux d’intérêt, une hausse fulgurante des prix des carburants et le prix des terres agricoles atteignent des sommets historiques », confirme le président de la Fédération de l’UPA de la Capitale-Nationale-Côte-Nord, Yves Laurencelle.
Voici quelques données sommaires également publiées dans le site Internet de l’UPA:
six fermes sur dix considèrent que la hausse du prix des carburants aura un impact néfaste;
trois entreprises sur dix considèrent que la hausse des taux d’intérêt pourrait les empêcher d’acquitter leurs obligations financières;
sept fermes sur dix vont diminuer ou reporter leurs investissements.
Des solutions
L’UPA énonce les solutions suivantes qui seraient à portée de main :
pour les entreprises agricoles en grande difficulté financière (taux d’endettement élevé et excédent monétaire négatif) :
o mettre en place une mesure de type compte d’urgence avec une portion non remboursable et reporter l’échéancier des entreprises agricoles en grande difficulté qui y ont eu accès;
o à défaut, instaurer un programme d’aide financière administré par la Financière agricole du Québec (FADQ) sur dépôt d’un plan de restructuration viable permettant, notamment, une recapitalisation du fonds de roulement sans nécessiter de nouveaux investissements;
bonifier le programme de protection contre la hausse des taux d’intérêt de la FADQ (à toute la relève);
bonifier le programme Agri-Québec pour les entreprises agricoles situées dans les régions périphériques;
actualiser la rémunération de l’exploitant au Programme d’assurance stabilisation des revenus agricoles;
mettre en place des mesures afin de s’assurer que le prix du diesel coloré payé par les entreprises agricoles soit inférieur au prix du diesel clair afin de refléter l’écart de taxes entre ces deux catégories de diesel.