Mon nouvel an médiatisé

par Nicolas Gaudreault
Mon nouvel an médiatisé

1er janvier 2024. C’était la veille du nouvel an hier et j’ai fait la fête comme il se doit. Parallèlement, mon corps le sent aussi. Bref, quoi de mieux que de régler un bon lendemain de veille par un trio MacPoulet en poutine, n’est-ce pas? J’enfile donc mes souliers, qui commencent futilement à devenir des chouclaques par leur médiocrité et par la négligence d’entretien, et mon manteau d’hiver ayant vécu quelques épisodes de slush boueuse.

Je m’y rends à pied, les écouteurs aux oreilles. Même si je me crois dans un clip vidéo des années 2000, je me rappelle rapidement que je ne suis que dans Portneuf grâce aux vieilles tabagies désuètes qui desservent un village entier et la griseur de ce temps. Je n’entends absolument rien sauf mon beat, mais dès que je croise les gens, je vois qu’on essaie de m’interpeller avec détresse. Ça presse vraiment, on dirait. Au début, j’ignore car je suppose que mon look hivernal de style SDF attire les gens et leurs cennes noires. ‘’Je ne vis pas dans la rue, je ne suis que moche ce matin, qu’on me laisse tranquille! », criais-je, avec un léger accent à la française, comme si je parodiais un vieux film de meneuses à claque basé sur le physique d’une troupe de jeunes lycéennes en furie.

Stupéfaits, les gens autour reculèrent d’un pas. J’aperçois même une femme, à l’arrière, avec une raie de fond de tête bien blanche délimitant ses cheveux ternes avec symétrie sortir son téléphone. La scène va être filmée. Une bataille en direct. Je suis sous l’œil des paparazzis, du public, du monde. Que me veut-on? J’enlève enfin mes écouteurs afin d’entendre le sujet de mon interview improvisée. La femme à la raie s’approche ; son Samsung Galaxy S10 frise le bout de mon nez, et bientôt ma bulle personnelle et patience. Elle ouvre la bouche et me demande d’une voix plutôt baryton: ‘’Quelle est votre résolution de l’année 2024? ».

Dès que j’entends le mot ‘’résolution », je suis tout de suite aigri, exaspéré, horripilé. Je ne pense même plus à mon trio qui m’était pourtant si précieux. Je ne pense qu’à ses pauvres gens qui ne vivent que pour leurs résolutions qui se sublimeront en flatulences vaguant dans l’univers d’ici quelques semaines. Je les trouve stupides car pourquoi attendre un son de cloche avant de faire un changement? Pourquoi attendre une date spécifique afin de s’améliorer et de vouloir faire mieux? Je crois que le désir d’être meilleur, de se sentir fier de soi-même et de se dépasser méritent de se faire fleurir à l’année longue. Il ne faut pas arrêter d’arroser nos plates-bandes après deux mois! Ou d’attendre la prochaine saison des pousses. Je trouve qu’il est préférable de se donner des objectifs quand on en ressent le besoin afin que ça en vaille la peine, et non pas à une date fixe.

Les gens se dispersent rapidement. Mon non-verbal parlait pour lui-même. J’en ai pas de résolutions en ce 1er janvier! À part goinfrer mon McDo, puis m’aimer sur mon couch. J’en aurai une demain ou après-demain, mais elle ne sera pas forcée. Elle viendra naturellement, comme le reste de la vie au final.

Bonne année!

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