Les régions de Portneuf et de la Mauricie se rejoignent au nord, à Lac-aux-Sables. Un endroit de vacances où tout semble vivre autour de la plage. Hommes, femmes et enfants s’y retrouvent, la peau bien protégée contre le soleil, sur le sable, dans ce lieu bien nommé. On y sent la décompression autour de ces caravanes, véritables chalets sur roues immobilisés à demeure. Des fleurs, des arbustes tout autour, nous font oublier leur côté véhicule. Mais on vit surtout à la plage, devant l’eau ou dans l’eau. Et même sur l’eau, car une armada de pontons sont prêts à prendre le large pour devenir des îles éphémères pour peu qu’on coupe les moteurs et qu’on jette l’ancre.
Le Bar du camping n’a rien de ces lieux clos et obscurs qu’on retrouve ailleurs. Avec sa façade sur le lac et sa terrasse ouverte à tous les vents, il a plutôt un aspect familial, si on peut dire. Plus loin, une pizzéria s’affiche à la vue de tous les baigneurs, histoire de leur rappeler qu’ils sont en vacances et qu’ils peuvent bien déserter leur propre cuisine, sans remords. Une petite fille marche, rêveuse, les pieds dans l’eau, indifférente à la présence des autres, elle affiche les mots BON VOYAGE sur son T-shirt.
Pendant ce temps, sur une autre plage, en Sicile, des hommes, des femmes et des enfants estiment avoir fait un bon voyage du seul fait de n’avoir pas péri en mer. Le «ponton» surpeuplé qu’ils ont quitté n’obéissait pas tellement aux normes de sécurité. Ces gens ont fui autre chose que le travail ou l’école. C’est la guerre ou la famine qui les a fait espérer et gagner une plage. Près de ce sable de débarquement, des vacanciers iront, là aussi, étancher leur soif sur une terrasse ou s’attabler à une pizzeria toute ouverte sur la Méditérannée. Pour les passagers clandestins, survivants de la mer, la plage devient un lieu de bonheur où ils se sentent revivre du seul fait d’y être. Même s’ils n’ont pas accès à la pizzéria.
Deux plages. Deux mondes. Mais, dans les deux cas, dans le même temps, des femmes, des hommes et des enfants cherchant un peu de bonheur, comme ils le peuvent, là où le hasard, l’histoire ou la bêtise les a placés. Tous ces humains d’un bord de l’eau sont, en quelque sorte, vus de très haut, des voisins.